17 mai 2009
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13:00
Aujourd'hui, dimanche 17 mai, c'est la journée mondiale contre l'homophobie.
Voici ma participation, répondant à l'invitation de Djou, une blogueuse dessinatrice que vous pouvez retrouver ici :
http://djou-bd.over-blog.com/
Je n'ai pas beaucoup de proches vraiment proches qui soient ouvertement homosexuels. Pas très étonnant, quand on considère les stats sur la question.
Celui que je connais le mieux, D., est en fait comme mon frère. Il a grandi esquinté par la vie. Famille destructrice, il a atterri dans une sorte de foyer DDASS (un seul D à DDASS à l'époque, je crois), où je vivais. Il ne savait pratiquement pas lire ni écrire. Après plusieurs essais d'apprentissages catastrophiques, mes parents (éducs), pourtant pas franchement favorables à l'armée, lui ont conseillé de faire une préparation militaire et, si ça collait, de s'engager.
Ca a collé.
L'armée l'a en partie sauvé. Il a appris à lire, à écrire, il a appris à se soumettre à des règles... Il a même été distingué dans les paras...
Et moi, je suivais son aventure avec des yeux ronds.
Comme Djou sur son illustration...
Un jour, il s'est marié. Il a eu des enfants. La relation avec sa femme était compliquée, comme elle peut l'être quand on n'a pas fini de régler tous ses comptes, et que, en prime, on est terriblement absent de la maison.
Et puis, il a décidé de divorcer.
Il a quitté l'armée, et... nous a présenté son ami.
Je suis tombée des nues, mais surtout, je l'ai plaint. Quelle souffrance il avait dû ressentir, pendant toutes ces années, dont celles à l'armée, en, progressivement, comprenant et acceptant sa "différence" ! L'armée n'est pas le milieu le plus compréhensif et le plus ouvert qui soit ! Combien de nuits sans dormir, alors qu'il avait justement besoin d'être au mieux de sa forme ? Combien de questions, de rejets par sentiment de culpabilité, combien d'hésitations, en ayant l'impression de tourner en rond dans une cage de mensonge ?
N'allez pas dire le contraire.
Autour de vous, écoutez bien.
Blagues lourdes (n'est-ce pas Minijack), attaques en règle sur internet ou dans diverses discussions ("contre-nature", associations à la pédophilie, homosexuels assimilés à des personnes sans valeurs morales, etc.), sans parler de la vie quotidienne forcément compliquée, forcément pleine d'hésitations et de questionnements que des hétéros ne subissent pas :
Dois-je te tenir par la main dans la rue ?
A Paris peut--être, en province, pas sûr.
Dans la rue, peut-être, dans le métro, pas sûr.
Dois-je t'embrasser quand j'en ai envie ?
Pas sûr.
Doit-on parler de notre sexualité à notre famille, à nos amis ?
(vous en parlez, vous ??)
Doit-on vivre ensemble ou chacun chez soi, pour éviter les ragots ?
Doit-on tirer un trait sur le fait de devenir parents ?
Toutes ces questions, assurément, font monter une colère profonde et sourde en moi.
Est-ce que je parle de mes préférences sexuelles avec mon entourage ??!!!??
Evidemment pas.
Pourtant, des homos sont "obligés" de le faire, finalement, pour vivre libres.
Et de subir, les remarques des petits cons dans la rue, dans le bus, à la plage.
Les regards lourds, ou détournés avec gêne, les insultes, les ragots surtout.
Est-ce que vous connaissez les pratiques de vos voisins au lit ????
Non... pourtant, tout le monde sait, et cause abondamment, si l'un d'eux est "pédé".
Ou célibataire à 40 ans !!!
"Mon fils n'a toujours pas de petite amie. Tu crois qu'il est homosexuel ? Oh mon dieu !!"
"Moi, je supporterai qu'il fasse n'importe quel boulot, mais pas qu'il soit pédé. Faut pas pousser."
MAIS BORDEL DE MIEL, ON S'EN FOUT !!!
Dans toutes les remarques homophobes, sans doute possible, je retrouve une forme de racisme.
Le même genre de réflexions imbuvables qui poussent les parents "plus blancs que blancs" à espérer secrètement que leur fille leur ramène tout sauf "un jaune", "un noir", ou "un arabe" (ou un laid, ou un gros, ou un vieux...). Qui pousse aussi certaines mères à offrir "Jamais sans ma fille" à leur jeune amoureuse de fille quand elle s'engage quand même avec un "différent".
Je n'ai jamais pu supporter le racisme.
Cela m'a tellement choquée au fil de mes années de prise de conscience du monde, que, assurément, c'est ce qui m'a fait choisir un homme noir pour père de mon premier enfant. Je l'aimais, oui. Avant tout bien sûr. Mais la part inconsciente de mon choix m'apparaît très clairement aujourd'hui. Je devais "réparer" le racisme de certains membres de ma famille. Réparer mon histoire, et donc, MONTRER que c'est possible.
Combien d'homos, comme D., mon frère de coeur, s'imposent des mariages ou des relations "bien convenables", alors que leur coeur les mène ailleurs ?
Combien de fois sont-ils obligés de mentir ou de se mentir, au moins par omission, et donc de souffrir, par peur des réactions des autres ?
Comment se fait-il que certains êtres humains soient hautement considérés, appréciés, respectés... jusqu'à ce qu'on apprenne QUI ils aiment ?
Eh merde.
Dans ce monde de cons, si même l'Amour n'a plus sa place que s'il entre dans les cases... !
Il est quand même temps que ça change, non ?
Bien à vous,
Polyb.
A lire :
Tous ces questionnements très bien décrits sur le blog de Djou dans cette planche BD :
http://djou-bd.over-blog.com/article-31393970.html
Sur son article d'aujourd'hui :
http://djou-bd.over-blog.com/article-31492628.html
vous trouverez beaucoup de liens intéressants sur le sujet.
Et quoi qu'il arrive, ne pas oublier :
http://www.rue89.com/2007/11/01/en-irak-la-chasse-aux-gays-est-ouverte?page=1
Ce n'est évidemment pas le seul endroit au monde où dire son homosexualité est dangereux...
Voici ma participation, répondant à l'invitation de Djou, une blogueuse dessinatrice que vous pouvez retrouver ici :
http://djou-bd.over-blog.com/
Je n'ai pas beaucoup de proches vraiment proches qui soient ouvertement homosexuels. Pas très étonnant, quand on considère les stats sur la question.
Celui que je connais le mieux, D., est en fait comme mon frère. Il a grandi esquinté par la vie. Famille destructrice, il a atterri dans une sorte de foyer DDASS (un seul D à DDASS à l'époque, je crois), où je vivais. Il ne savait pratiquement pas lire ni écrire. Après plusieurs essais d'apprentissages catastrophiques, mes parents (éducs), pourtant pas franchement favorables à l'armée, lui ont conseillé de faire une préparation militaire et, si ça collait, de s'engager.

Ca a collé.
L'armée l'a en partie sauvé. Il a appris à lire, à écrire, il a appris à se soumettre à des règles... Il a même été distingué dans les paras...
Et moi, je suivais son aventure avec des yeux ronds.
Comme Djou sur son illustration...
Un jour, il s'est marié. Il a eu des enfants. La relation avec sa femme était compliquée, comme elle peut l'être quand on n'a pas fini de régler tous ses comptes, et que, en prime, on est terriblement absent de la maison.
Et puis, il a décidé de divorcer.
Il a quitté l'armée, et... nous a présenté son ami.
Je suis tombée des nues, mais surtout, je l'ai plaint. Quelle souffrance il avait dû ressentir, pendant toutes ces années, dont celles à l'armée, en, progressivement, comprenant et acceptant sa "différence" ! L'armée n'est pas le milieu le plus compréhensif et le plus ouvert qui soit ! Combien de nuits sans dormir, alors qu'il avait justement besoin d'être au mieux de sa forme ? Combien de questions, de rejets par sentiment de culpabilité, combien d'hésitations, en ayant l'impression de tourner en rond dans une cage de mensonge ?
N'allez pas dire le contraire.
Autour de vous, écoutez bien.
Blagues lourdes (n'est-ce pas Minijack), attaques en règle sur internet ou dans diverses discussions ("contre-nature", associations à la pédophilie, homosexuels assimilés à des personnes sans valeurs morales, etc.), sans parler de la vie quotidienne forcément compliquée, forcément pleine d'hésitations et de questionnements que des hétéros ne subissent pas :
Dois-je te tenir par la main dans la rue ?
A Paris peut--être, en province, pas sûr.
Dans la rue, peut-être, dans le métro, pas sûr.
Dois-je t'embrasser quand j'en ai envie ?
Pas sûr.
Doit-on parler de notre sexualité à notre famille, à nos amis ?
(vous en parlez, vous ??)
Doit-on vivre ensemble ou chacun chez soi, pour éviter les ragots ?
Doit-on tirer un trait sur le fait de devenir parents ?
Toutes ces questions, assurément, font monter une colère profonde et sourde en moi.
Est-ce que je parle de mes préférences sexuelles avec mon entourage ??!!!??
Evidemment pas.
Pourtant, des homos sont "obligés" de le faire, finalement, pour vivre libres.
Et de subir, les remarques des petits cons dans la rue, dans le bus, à la plage.
Les regards lourds, ou détournés avec gêne, les insultes, les ragots surtout.
Est-ce que vous connaissez les pratiques de vos voisins au lit ????
Non... pourtant, tout le monde sait, et cause abondamment, si l'un d'eux est "pédé".
Ou célibataire à 40 ans !!!
"Mon fils n'a toujours pas de petite amie. Tu crois qu'il est homosexuel ? Oh mon dieu !!"
"Moi, je supporterai qu'il fasse n'importe quel boulot, mais pas qu'il soit pédé. Faut pas pousser."
MAIS BORDEL DE MIEL, ON S'EN FOUT !!!
Dans toutes les remarques homophobes, sans doute possible, je retrouve une forme de racisme.
Le même genre de réflexions imbuvables qui poussent les parents "plus blancs que blancs" à espérer secrètement que leur fille leur ramène tout sauf "un jaune", "un noir", ou "un arabe" (ou un laid, ou un gros, ou un vieux...). Qui pousse aussi certaines mères à offrir "Jamais sans ma fille" à leur jeune amoureuse de fille quand elle s'engage quand même avec un "différent".
Je n'ai jamais pu supporter le racisme.
Cela m'a tellement choquée au fil de mes années de prise de conscience du monde, que, assurément, c'est ce qui m'a fait choisir un homme noir pour père de mon premier enfant. Je l'aimais, oui. Avant tout bien sûr. Mais la part inconsciente de mon choix m'apparaît très clairement aujourd'hui. Je devais "réparer" le racisme de certains membres de ma famille. Réparer mon histoire, et donc, MONTRER que c'est possible.
Combien d'homos, comme D., mon frère de coeur, s'imposent des mariages ou des relations "bien convenables", alors que leur coeur les mène ailleurs ?
Combien de fois sont-ils obligés de mentir ou de se mentir, au moins par omission, et donc de souffrir, par peur des réactions des autres ?
Comment se fait-il que certains êtres humains soient hautement considérés, appréciés, respectés... jusqu'à ce qu'on apprenne QUI ils aiment ?
Eh merde.
Dans ce monde de cons, si même l'Amour n'a plus sa place que s'il entre dans les cases... !
Il est quand même temps que ça change, non ?
Bien à vous,
Polyb.
A lire :
Tous ces questionnements très bien décrits sur le blog de Djou dans cette planche BD :
http://djou-bd.over-blog.com/article-31393970.html
Sur son article d'aujourd'hui :
http://djou-bd.over-blog.com/article-31492628.html
vous trouverez beaucoup de liens intéressants sur le sujet.
Et quoi qu'il arrive, ne pas oublier :
http://www.rue89.com/2007/11/01/en-irak-la-chasse-aux-gays-est-ouverte?page=1
Ce n'est évidemment pas le seul endroit au monde où dire son homosexualité est dangereux...